jeudi 13 mars 2025
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Des bleus à l’âme

À Marseille, les arts décoratifs déclinent leurs collections et leurs différents pigments bleus, sur le corps, la faïence, la peinture. Plus allégorique la Passion bleue à Toulon est celle de la mer, jusque dans ses tragédies. Et tandis qu’à la Friche on cherche à verdir la ville pour la rendre, par bribes, habitable, à Gap le Cercle de Midi avance que la ruralité a des modèles de production culturelle inédits. Un avenir en vert, un avenir en bleu ? 

Les couleurs n’ont de réalité physique que notre perception, notre regard qui saisit les fréquences lumineuses et en transmet le message, à décoder. Produit de notre cerveau, sujet de nos subjectivités, la couleur est difficilement dissociable de sa symbolique. Le vert, couleur écologique, s’affranchit peu à peu de la verdeur des pousses et de la naïveté de la jeunesse mais y reste, inconsciemment, associé. Le rouge, couleur du combat et de la vivacité, est aussi celui du sang, de la violence effrayante. Mais le bleu ? 

Couleur de l’infini du ciel et de la mer se reflétant l’un l’autre, est aussi celui des uniformes et de la douleur, des bleus à l’âme, des mots bleus, du blues et du spleen. Et des petits garçons, construits sur une opposition binaire avec les petites filles en rose. Que les suffragettes anglaises refusèrent en adoptant le violet féministe comme une alliance, en elles, des deux genres. 

Rainbow warrior

Décrétée « couleur incontournable en 2024 » par les magazines de mode et de déco d’intérieur, la résurgence de la couleur bleue aurait-elle à voir avec le retour de la droite, voire du masculinisme, sur la scène internationale ? Les différentes nuances de bleu, surtout marine, s’affichent aujourd’hui comme un symbole d’apaisement face au mélange des genres, aux revendications féministes, au rainbow flag LGBTQI+, au rouge communiste, au vert écologiste, bref, à toutes les couleurs woke. 

Comme une force sourde, imposant leur robustesse, les artistes aujourd’hui rappellent que le bleu est aussi la couleur que les coups laissent sur les corps. Stanislas Nordey incarne Henri Alleg qui imposa ses convictions communistes face à l’armée tortionnaire pendant la bataille d’Alger. Les Suppliques rappellent que l’horreur du Vél’d’Hiv était légale et perpétrée par 9 000 Français en uniforme aux ordres de l’État français. Que le bleu de la loi a quelquefois viré au brun. 

Face à cet azur sombre, celui du Flamenco Azul se revendique inclusif, mondial et populaire. Marseille ouvre le portail Mars Imperium et explore sans complaisance sa mémoire impériale,  coloniale et post-coloniale. Et le Dictionnaire des Marseillaises convoque une autre histoire qui tarde à s’écrire dans l’espace public. 

L’ouverture sur le monde d’un Babel Minots s’exerce dès le plus jeune âge : la joie bigarrée de la jeunesse, rebelle à l’uniforme qu’on veut lui imposer dans les écoles, reste étrangère à la couleur dominante de l’apaisement, tourne le dos au ciel qui s’assombrit. Dans sa diversité inclusive elle ouvre un autre chemin, vers un ciel strié d’un arc-en-ciel triomphant.

AGNES FRESCHEL


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