mercredi 2 octobre 2024
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MONTPELLIER : Offenbach, hymne à la Vie 

La Vie Parisienne mis en scène par Christian Lacroix a fini sa carrière, débutée en 2021, par un triomphe mérité à l’Opéra Comédie de Montpellier

La Vie Parisienne célèbre la capitale française comme l’épicentre cosmopolite d’un monde, coloré, populaire et enivré, un concentré tapageur de la modernité… Christian Lacroix ne pouvait que s’en emparer ! Pour sa première mise en scène lyrique l’artiste fait preuve d’une maturité d’analyse et d’une juvénilité du regard qui surprend à chaque instant de ces 3h30 trop courtes. Et si la version filmée diffusée sur ARTE TV était enthousiasmante, les chœurs et l’orchestre de Montpellier ont donné un relief et un volume inusité à la musique du maître français de l’opéra bouffe et de l’opérette. 

Sous-genre convenu ? Au moment des « fêtes » resurgit avec ce répertoire la prévention de légèreté, de musique convenue et facile, que l’on offrirait, un peu méprisant, en cadeau à ceux qui viennent exceptionnellement à l’opéra, une fois par an, pour applaudir en mesure et reconnaître des tubes d’antan dont ils ont hérité, souvent sans le savoir, des lèvres fredonnantes de leurs parents ou aïeux. Si la question de l’opportunité esthétique se pose clairement avec certains livrets vulgaires et sexistes et certaines partitions aux effets redondants et balourds, Offenbach a écrit des pages merveilleuses, et cette production inédite renoue avec la version de 1866, jamais jouée, qui recèle des petites merveilles vocales et orchestrales. La musique est dont un régal, d’autant que les chanteurs, Florie Valiquette en tête, ont de sacrés brins de voix. 

Sans fausse note ! 

Mais c’est surtout leurs performances d’acteurs qui épatent : ils sont drôles, agiles, pétulants, excessifs, touchants, emportés par un élan commun, un chœur qui les dynamise, des danseurs qui les entrainent dans un mouvement sans relâche et commun. C’est un régal constant pour les yeux, les costumes étant évidemment somptueux de couleurs, de formes et de matières qui osent tout, le décor, dans ses citations modernes voire futuristes, faisant l’apologie d’une société en mouvement, en expansion, où le train, l’ascenseur, les cabarets et hôtels viennent bouleverser l’ordre des salons bourgeois et d’une aristocratie en train de disparaître. 

Car La Vie Parisienne est une critique acerbe de ces gens « du monde » que leurs valets remplacent et dupent allègrement. L’apologie du plaisir, de l’alcool, de la fête et du sexe, sans entrave, bouleverse l’ordre social, et se double d’un éloge permanent de l’étranger et du cosmopolite, qui fonde l’identité parisienne dès le 19e siècle. Un rappel bienvenu en ces temps de loi Immigration… d’autant que Christian Lacroix démine très habilement les passages discutables de l’œuvre. En faisant danser par des hommes la danse de la belle femme qu’on harcèle, en exécutant le french cancan par un mime avec les bras, il libère aussi la femme de l’objectivation dont elle était victime lorsque le plaisir sexuel s’affirmait enfin, mais à ses dépends…

AGNES FRESCHEL

La Vie Parisienne s’est jouée à l’Opéra comédie du 20 décembre 2023 au 4 janvier 2024
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