mercredi 2 octobre 2024
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OCCITANIE : Le « je » de la dame 

D’une poésie plastique autant que textuelle, Dissection d’une chute de neige analyse avec philosophie la question du pouvoir féminin

Une femme est là, devant nos yeux, enfermée dans une cage de verre dans laquelle plane une neige légère comme une plume. Prison ou refuge, difficile à dire. Les portes se verrouillent de l’intérieur et non de l’extérieur tandis que le monde s’y reflète sans pour autant l’atteindre. On sait peu de choses d’elle, mise à part que cette « fille roi » aime les mots, les étoiles et réfléchir. Mais pas se marier, ni enfanter, encore moins faire la guerre. Elle refuse tout en bloc : les exigences du pouvoir comme les règles que la société inflige à son genre. Elle voudrait faire ce qu’elle veut, aimer qui elle veut, homme ou femme (notamment cette Belle qui fait vibrer son corps), comme elle l’entend. On pourrait y voir une belle leçon de féminisme. C’est là que la dissection nous glace. Et nous replonge dans l’Histoire comme dans les combats de notre temps. 

Caligula au féminin

La pièce de Sara Stridsberg est librement inspirée de la vie sulfureuse du mythique « roi » Christine de Suède qui régna de 1632 à 1654. De manière aussi intelligente que poétique, l’auteure suédoise nous donne à voir l’introspection d’une femme qui en prenant le titre de roi ne fait que perpétuer les stéréotypes d’une société patriarcale sans pitié. La mise en scène très réussie de Christophe Rauck renforce la sensation que cette reine d’un autre genre est prise au piège de son propre jeu. Car jamais elle n’en maîtrise les règles. Pas plus que ses pulsions qui la transforment peu à peu en Caligula au féminin, tenté de sombrer dans une folie morbide par idéalisme. Face à elle : un amoureux transi, une amante malmenée, un conseiller qui tient les comptes, une mère devenue folle à force de mépris, un père fantôme… Et un philosophe qui pose les bonnes questions l’air de rien, l’entraînant malgré elle dans une maïeutique socratique salvatrice. Les douleurs traversées finissent par la faire accoucher de son propre destin. Parfois, combattre c’est renoncer. 

ALICE ROLLAND

Dissection d'une chute de neige a été présenté du 3 au 5 avril au Domaine d’O, Montpellier
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